samedi 3 mars 2007

La transformation du "Jihad"

Le mot Jihad est issu de la racine « Jahada » qui exprime un effort déterminé en vue d’un but.
A l’origine dans le Coran, où il n’apparaît que très peu (35 fois sur 6235 versets), le Jihad n’a aucune connotation militaire ou de violence. Il est pris en son double sens: matériel (assistance matérielle et financière) et moral.
Cependant, la pratique du prophète concernant le Jihad, a pu être largement interprétée et déformée en vue d’atteindre des buts de domination et de terrorisme.

1/ La pratique du prophète
Sous le prophète, le Jihad a certes été quasi exclusivement militaire, mais cachait une volonté politique et morale.
En effet, suite à l’Egire, Mohammed (Mahomet) mena un Jihad militaire contre les habitants de La Mecque qu’ils vainquirent en 630.
Peu après, le prophète dirigea une campagne massive (30000 soldats) dans le nord de la péninsule arabique, aux confins de l’Empire byzantin. Mais aucune goutte de sang ne fut versée. Il s’agissait en réalité d’une campagne politique.
Comme l’a résumé un hadith : « Nous sommes revenus du petit Jihad (Jihad militaire) pour faire le Grand Jihad » (Jihad politique dans la lutte mystique contre le mal).
Ainsi, dès l’origine, le Jihad était un facteur de force et d’unité.
Seulement, la pratique du prophète fut largement interprétée, et le hadith précité fut contesté, pour ne voir dans le Jihad que le « petit Jihad » : le Jihad militaire.

2/ Le Jihad militaire : expansionnisme musulman
Après la mort du prophète, les Califes se succèdent et se disent appliquer le Coran selon la pratique de Mohammed.
Seulement, dès le deuxième Calife, Omar, l’on va assister à une véritable politique expansionniste musulmane (ce qui vaudra au Calife Omar l’appellation de « Calife du Jihad »).
Cette expansion va correspondre à l’âge d’or du monde arabe, mais sera stoppée et refoulée au VIIIème (notamment à Poitiers).
La reconquista espagnole (pendant 5 siècles dans la péninsule ibérique) et les croisades (1095-1291) conduisent à l’apparition d’une nouvelle forme de Jihad : le Jihad défensif.
A préciser que ce sont des non-arabes qui ont mené le Jihad en terre arabe contre les croisés : Nur ad din (turc), Salah ad din (perse)
Ce Jihad défensif est le précurseur de certains mouvements de « libération » (qualifiés pour certains de mouvements terroristes) tels le Hamas ou le Hezbollah.
Seulement, au delà de ce Jihad défensif, certains y ont vu Jihad offensif, sectaire et prédateur.

3/ La théorisation du Jihad à outrance : l’apport de Ibn Taimyya
Le livre d’Ibn Taimyya (fin XIIIème – début XIVème) est bien connu de tous les islamistes contemporains.
En effet, dans cette nouvelle théorie du Jihad, les musulmans sont réduits au rang de « croyants » (« Takfiris »). Ils ne sont plus rien, pire que des non-musulmans, car il faut les démasquer.
En revanche, les jihadistes sont eux, des vrais musulmans, et peuvent par conséquent tuer des « croyants » pour faire le Jihad. Ibn Taimyya invente ainsi le Jihad anti-musulmans (déislamisation des musulmans pour faire le Jihad).
Il devient le père spirituel de ce Jihad offensif, sectaire et prédateur (négation totale de l’humanité de la cible du Jihad).
A l’époque, ce courant n’avait pas beaucoup d’impact car il n’y avait quasi plus de Jihad.

Mais il renaîtra à l’époque contemporaine grâce à l’auteur Ibn Abd El Wahhab, fondateur du wahhabisme. Celui-ci s’allie avec la famille Saoud (famille regnante actuelle d’Arabie Saoudite) et mène un Jihad agressif contre les minorités chiites.
Ce Jihad offensif anti-musulman est très présent dans la pratique terroriste d’Al Qaïda, qui ne se contente pas de viser des occidentaux, mais aussi des arabes musulmans.


En conclusion, le Jihad à l’origine conçu comme un précepte moral de lutte mystique contre le mal, s’est transformé au fil du temps en véritable précèpte militaire.
Mais, il convient de distinguer de nos jours un « Jihad défensif » (de libération) avec un « Jihad offensif » (visant aussi bien les musulmans que les non-musulmans).

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